Les guérisons inexpliquées sous la loupe
Parfois, l’impossible se produit : une guérison spontanée, là où les médecins avaient déjà abandonné tout espoir. Des cas rares mais bien réels, qui mettent la science face à ses limites, révèlent le pouvoir du mental et confirment que ce qui ne nous tue pas peut, parfois, nous rendre plus fort.
Ceux qui les ont vécues un se considèrent souvent comme des miraculés. Les médecins préfèrent parler de remissions inexpliquées, mais plupart d’entre eux l’admettent : la médecine a ses limites, la science ne comprend pas tout. Tous les cancérologues connaissent ainsi des cas de tumeurs ayant disparu après que tous les traitements aient échoués, ou même parfois sans aucun traitement. Cela concernerait environ 1 cas sur 100’000 pour les cancers, trois fois moins pour l’ensemble des autres maladies.
Il n’y a jamais une seule explication, mais une combinaison de plusieurs facteurs : généralement et en premier lieu une transformation radicale de l’alimentation semble indispensable, en commençant par la suppression de tous les aliments transformés et du sucre (lire également le dossier spécial consacré aux « miracles du cru » dans le Chou Brave 22). Puis la volonté de cultiver autant que possible une attitude positive, de s’ouvrir aux autres, de cultiver les interactions sociales positives et d’accepter aide et soutien. Les émotions positives renforcent en effet notre système immunitaire, en stimulant la production de sérotonine et de dopamine, les hormones du plaisir, ainsi que de l’ocytocine, l’« hormone de l’amour », qui ont des qualités anti-inflammatoires.
L’importance du mental
Les malades qui guérissent contre toute attente ne le doivent pas au hasard. Ce sont ceux qui « s’accrochent », refusent d’accepter la fatalité, tentent tout, y compris les approches alternatives, sans pour autant renoncer à tout esprit critique. Avoir une raison de vivre extérieure à soi-même, par exemple des enfants en bas âge, peut faire la différence, mais l’essentiel serait cet état d’esprit combatif et positif, qu’on retrouve chez tous les survivants.
Un autre facteur de guérison identifié tient à l’expression des émotions refoulées. La décision consciente d’être plus à l’écoute de soi-même, pourquoi pas au travers d’une psychothérapie, de changer sa manière de vivre et de voir la vie, serait également pour beaucoup dans les cas de guérison spontanée.
Il n’y a là, au fond, rien de magique ni de mystérieux. La digestion, la circulation sanguine ou le système immunitaire sont des processus contrôlés par le cerveau, via le système nerveux autonome. Se sentir stressé ou effrayé peut faire s’emballer le cœur et se vider les intestins, mais aussi déclencher une réponse immunitaire, appelée inflammation. Ces processus ne sont pas sous contrôle conscient – nous ne pouvons pas vouloir que ces changements se produisent – mais il est possible de les influencer de manière indirecte. C’est là que mental intervient.
La spiritualité et la foi peuvent également être d’une grande aide, en apportant la paix intérieure et surtout la conviction que l’on peut guérir, qu’il y a un espoir. L’exemple le plus frappant, ce sont bien sûr les guérisons dans les lieux de pèlerinage, comme à Lourdes, ou ces cas sont recensés et analysés de manière tout ce qu’il y a de plus scientifique.
Les miracles de Lourdes
Depuis l’apparition de la Vierge à Bernadette Soubirous, en 1858, jusqu’à nos jours, les annales de Notre-Dame de Lourdes recensent près de 7300 guérisons inexpliquées. Mais parmi celles-ci, seules 70, soit moins de 1%, ont été officiellement reconnue comme miraculeuses par l’Eglise catholique, au terme d’un processus particulièrement long et draconien.
Et pourtant : le Bureau des constatations médicales de Lourdes, une instance unique au monde, mis en place par l’Eglise des 1883, reçoit près d’une déclaration par semaine de malades estimant être subitement guéris. Sur cette quarantaine de cas, seul une dizaine sont juges dignes d’un examen plus approfondi par les médecins qui encadrent les pèlerinages : est-ce que le patient était réellement malade et, si oui, quel était le diagnostic ? La guérison est-elle inattendue et complète ? Y a-t-il une explication possible à cette guérison ?
Le Bureau des constatations réunit les documents attestant de la gravite de la maladie puis de sa totale guérison. Si une majorité des médecins membres l’approuve en réunion, le dossier est ensuite transmis au Comité médical international de Lourdes (CMIL), fonde en 1925, qui réunit une vingtaine de spécialistes. Sur la quarantaine de dossiers ouverts tous les ans par le Bureau, seuls quatre ou cinq parviennent au CMIL, qui va prendre son temps (plusieurs années) pour décortiquer chaque cas. Quand aucune explication rationnelle permettant d’expliquer la rémission n’est trouvée, le cas est finalement déclaré inexplicable « en l’état actuel des connaissances de la science ». Un aveu qui devient de plus en plus rare : cinq cas seulement depuis 1990.
Mais une guérison inexpliquée à Lourdes n’est de loin pas encore miraculeuse. Seule l’Eglise peut la reconnaître, ou non, comme tel, et elle ne craint visiblement pas de décourager l’espérance de ses fidèles. La décision revient à l’évêque dont dépend la localité où vit la personne guérie, selon des critères qui n’ont plus rien de scientifiques : Celle-ci est-elle, ou fut-elle, catholique pratiquante, moralement exemplaire ? A-t’elle eu une révélation spirituelle ? La guérison doit être un « signe de Dieu », les « mauvais profils » sont rejetés. Typiquement, le dernier miracle reconnu, en 2018 pour les 150 ans de l’apparition mariale, est celui d’une religieuse, la bien nommée Sœur Bernadette, guérie en 2008. Le précédent cas remontait a… 1989.
L’importance du milieu
Mais les guérisons inexpliquées ne surviennent pas qu’à Lourdes. En 1993, une étude a analysé de façon aussi exhaustive que possible tous les cas de guérisons spontanées recensés en milieu hospitalier dans le monde entre 1864 et 1992. L’étude aboutit au total de 1574 cas sur cette période de 128 ans, soit un rapport de 1 guérison inexpliquée pour 333’333 malades (sans compter les cancers, que ne traite pas non plus le CNIL).
Le physiologiste français Claude Bernard soutenait dès les années 1860 que la maladie ne pouvait pas être expliquée uniquement par la propagation d’agents pathogènes mortels, mais que notre « milieu intérieur » était tout aussi important. Les maladies ne s’attaquent à notre corps que parce que nous avons un système immunitaire faible : « Le microbe n’est rien, c’est le terrain qui est tout… » disait Bernard, qui rejoignait Antoine Béchamp, contemporain et adversaire de Pasteur, pour lequel c’était les organismes vivants eux-mêmes, en se déréglant, qui favoriseraient la prolifération des maladies. Son continuateur, le professeur Tissot, fut le fondateur de la Ligue nationale contre l’obligation des vaccinations et un des premiers défenseurs du végétarisme et du jeune en France.
Dès le XIXe siècle, le chirurgien américain William Coley avait remarqué le lien entre la survenue d’une infection aiguë avec une forte fièvre et la régression spontanée d’un cancer dans la période qui suit. Une infection stimule en effet le taux de lymphocytes et autres anticorps sécrétés par le corps pour se défendre. Ces cellules de l’immunité ainsi activées pourraient, dans certains cas, continuer sur leur lancée et s’attaquer aux cellules cancéreuses, et être a l’origine des guérisons spontanées du cancer.
Plusieurs études récentes ont confirmé que 90% des patients ayant réussi à guérir naturellement d’une leucémie avaient souffert d’une autre infection, par exemple une pneumonie, immédiatement avant la disparition du cancer. D’autres études ont noté la disparition spontanée de tumeurs cancéreuses après une diphtérie, une hépatite, une grippe, ou une rougeole, ou toute autre maladie. Il s’avère que ce qui ne nous tue pas peut réellement, dans certain cas, nous rendre plus fort.
Le Chou Brave 39, “Mort ou Vif”, mars 2022